On entend souvent parler des budgets participatifs du fait qu’ils fleurissent de plus en plus en France dans des grandes et petites collectivités.
D’où peut bien provenir le concept de “budget participatif” ? Une ville en fut la pionnière et nombreuses sont celles qui l’ont suivi.
Quelle est donc cette ville qui a initié un mouvement si remarquable qu’il va briller dans le monde entier ? Quelles sont les raisons qui l’ont amené à lancer le premier budget participatif de l’histoire ?
L’origine des budgets participatifs
Porte Alegre : berceau du budget participatif
C’est en 1989 que la ville de Porto Alegre dans le sud du Brésil organise le premier budget participatif. L’émergence de ce modèle démocratique trouve ses racines dans plusieurs évènements, notamment la fin de la dictature militaire en 1985. Ce n’est donc en 1989 que furent organisées les premières élections au suffrage universel direct pour élire le maire de la ville. C’est le Parti des travailleurs (PT) qui remporte les élections avec comme candidat Olivio Dutra.
Le maire et ses conseillers cherchent alors à redonner une voix aux citoyens, à lutter contre la corruption et à optimiser l'allocation des fonds publics. En effet, le développement rapide de la ville de Porto Alegre a engendré des inégalités au sein de la population, surtout l’accès aux infrastructures publics.
Les objectifs de ce budget participatif : Transparence, responsabilité et équité
Face à ces enjeux, comment la ville a-t-elle envisagé de concrétiser ses ambitions démocratiques et égalitaires ? Comme évoqué précédemment, les raisons qui ont poussé la ville de Porto Allegre à lancer un budget participatif sont multiples :
Une lutte contre la corruption et la mauvaise gestion des finances publiques
Le système politique brésilien de l'époque était marqué par des scandales de corruption. Le budget participatif citoyen était considéré comme une réponse à ces problèmes. En impliquant directement les citoyens dans la prise de décision budgétaire, l’objectif était de réduire les opportunités de corruption et renforcer la transparence.
Une amélioration de la responsabilité gouvernementale
Le budget participatif visait à accroître la responsabilité du gouvernement envers ses citoyens. En donnant aux résidents de Porto Alegre un rôle actif dans la définition des priorités budgétaires, les élus locaux devaient davantage rendre des comptes sur l'utilisation des fonds publics, toujours sur le principe de la transparence.
Une réduction des inégalités sociales
Face aux inégalités sociales prononcées, Porto Alegre a introduit le budget participatif dans le but d'atténuer ces disparités, en orientant les investissements vers les quartiers les plus nécessiteux.
Une meilleure allocation des ressources
En donnant la chance aux citoyens de suggérer et de voter sur des initiatives locales, le budget participatif assurait une répartition des ressources plus juste, en adéquation avec les besoins véritables des habitants, tout en ayant une approche ciblée sur le terrain.
L'architecture du budget participatif à Porto Alegre
La mise en place du budget participatif à Porto Alegre s'est articulée autour de divers acteurs, notamment les résidents, les associations, les fonctionnaires et les élus. L’organisation en elle-même se déroulait en 3 temps forts.
Des réunions publiques et dépôt
En premier lieu, des réunions publiques dans les différents départements de la ville et dans les quartiers sont organisés. Durant ces rencontres, les participants conçoivent et discutent des projets à soumettre à la mairie. Cette étape correspond à ce que nous appelons la phase de dépôt via les conseils de quartier et les ateliers d’idéation.
Des réunions à la Mairie et analyse des projets
Les discussions progressent ensuite à un niveau plus global, où les représentants élus des départements entrent en dialogue avec la Mairie. Durant cette période, un certain nombre de réunions axées sur des aspects techniques et financiers sont organisés. Cette étape équivaut à ce que nous définissons comme notre phase d'analyse.
Le vote et la mise en œuvre des projets
La dernière phase consiste à voter sur les projets à mettre en œuvre parmi ceux proposés et considérés réalisables au regard du budget prévu. Cette phase correspond à ce que nous qualifions de mise en œuvre des projets.
Les résultats du premier budget participatif
Suite à sa mise en application, cet exercice novateur a eu des résultats concrets comme la construction d’écoles, la création du tout-à-l’égout, la construction de routes…
Avec le temps, le modèle a gagné en popularité auprès des habitants, convaincus par son impact réel. Il s'est exporté facilement dans d’autres villes au Brésil, toujours dans un objectif d’allocation plus équitable des ressources.
Les bénéfices du budget participatif, qu'ils soient redistributifs, anti-corruption ou de cohésion sociale, ont assuré sa pérennité pendant près de deux décennies. Suite au premier forum social mondial en 2001 à Porte Allegre, le modèle du budget participatif s’est largement répandu et la Banque mondiale a reconnu cette démarche démocratique innovante, la considérant comme un exemple de bonne gouvernance.
Le budget participatif fait son chemin au Brésil
De nombreuses autres villes au Brésil ont suivi l'exemple de Porto Alegre en mettant en place des budgets participatifs.
Belo Horizonte
Belo Horizonte, la capitale de l'État du Minas Gerais, a lancé son propre budget participatif en 1993, s'inspirant du modèle de Porto Alegre.
Il est devenu l'un des exemples les plus connus de budget participatif au Brésil. En effet, le budget participatif de Belo Horizonte a survécu à plusieurs administrations municipales, montrant que le processus avait des racines solides et était apprécié par la population. De plus, ce budget a été appliqué à une grande échelle dans une ville majeure, ce qui a montré que le budget participatif pouvait fonctionner dans des contextes urbains complexes.
Le succès du budget participatif de cette ville réside aussi dans une communication digitale et physique (prospectus, bandes dessinées…) massive sur chaque étape du projet.
Recife
La ville de Recife a introduit son budget participatif un an seulement après Belo Horizonte. Il a permis aux citoyens de participer activement à la planification et à l'affectation des ressources budgétaires de la ville notamment sur les thèmes de pavage, drainage et assainissements des rues.
Salvador de Bahia
À Salvador de Bahia, comme dans d'autres villes, le budget participatif a été mis en place pour la première en 1997. L’objectif était de renforcer la démocratie locale, responsabiliser la municipalité et répondre plus efficacement aux besoins des citoyens, en particulier dans les quartiers défavorisés. Les habitants ont l'occasion de participer à des assemblées où ils peuvent discuter des besoins de la communauté et définir les priorités pour les investissements.
Un grand nombre de villes ont suivi l’exemple de Porto Alegre suite au succès de sa démarche de budget participatif. C'est pour cette raison que le budget participatif s'est étendu à de nombreuses villes à travers le monde, chaque ville adaptant le budget à ses propres spécificités. Ils ont servi d’exemple à d’autres pays qui s’en sont ensuite emparés pour renforcer leur démocratie locale.
Le budget participatif en France
C’est dans les années 2000 que le budget participatif traverse l’océan Atlantique et pose ses valises sur nos plages ou plus précisément à la capitale.
Paris
En 2002, la ville de Paris a lancé l'une des premières initiatives de budget participatif en France. Les habitants étaient invités à proposer des projets qui pourraient être financés par une partie du budget municipal. Les projets proposés étaient ensuite soumis au vote des citoyens pour déterminer ceux qui seraient réalisés. Cette expérience a été considérée comme un succès et a inspiré d'autres villes en France.
Grenoble
C’est en 2003 que la ville de Grenoble a suivi l'exemple de Paris en lançant son propre budget participatif en 2003. Les citoyens grenoblois étaient encouragés à soumettre des idées de projets pour améliorer leur ville, et les projets sélectionnés étaient ensuite financés grâce à une partie du budget municipal.
Poitou-Charentes
Le Poitou-Charentes (maintenant qui fait partie de la région Nouvelle-Aquitaine) a été parmi les premières régions à mettre en œuvre un budget participatif pour les lycées en 2004. L'objectif principal de cette initiative était de donner la parole aux lycéens et de les impliquer directement dans la prise de décision concernant des projets d'investissement au sein de leur établissement. Cette initiative a été saluée comme un moyen de renforcer la citoyenneté active chez les jeunes, de les sensibiliser aux processus décisionnels et budgétaires.
Ainsi, la ville brésilienne de Porto Alegre est le berceau des budgets participatifs. Le succès rencontré a encouragé d'autres villes au Brésil comme Belo Horizonte ou encore Recife à adopter ce modèle. Le mouvement a traversé l'Atlantique dans les années 2000, avec des villes françaises comme Paris et Grenoble emboîtant le pas.
Aujourd’hui, en France, différents acteurs encouragent l’utilisation du budget participatif en ligne (tout en le combinant à des méthodes en présentiel).
Plus de 400 collectivités en France ont déjà lancé un budget participatif citoyen à différents échelon (local, départemental ou encore régional). Chaque année, de plus en plus de budget participatif communal sont lancés.
Les entreprises de civic tech, offrant des plateformes dédiées au budget participatif, jouent un rôle majeur dans cette évolution démocratique, soutenant les collectivités désireuses de se lancer dans l’aventure. Envie de franchir le pas et de mettre en œuvre un budget participatif ? Découvrez dès maintenant comment Cap Collectif peut vous accompagner.
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